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Reconquête de février 2013
Recension par
Louis CHAGNON
PRESSE
Louis Chagnon
professeur d'histoire,
chargé de recherche
au Service Historique
de l'Armée de l'Air
de 2003 à 2005, puis
au Service Historique
de la Défense.
Mohammad Reza Pahlavi,
le dernier Shah/1919-1980
par Houchang Nahavandi
et Yves Bomati


Un empereur peut-il être un sujet ?
Voici un livre qui le démontre.

Un ouvrage à deux voix qui nous offre une somme sur le dernier Shah d'Iran, Mohammad Réza Pahlavi.
Deux voix, car l'ouvrage est le fruit du travail de deux auteurs : Houchang Nahavandi et Yves Bomati.
Nous n'avons plus à présenter notre ami Houchang Navahandi, ancien ministre du Shah et ancien recteur des universités de Shiraz et de Téhéran, dont nous évoquons régulièrement les ouvrages dans cette revue et qui nous fait le plaisir de sa présence, trop rare à notre goût, lors de conférences et lors des universités d'été du Centre Charlier. Nous rappellerons les ouvrages qu'il a écrits : Révolution iranienne, vérité et mensonges publié chez l’Age d'homme en 2000, Carnets secrets, chute et mort du Shah paru chez Osmondes en 2004, Iran, le choc des civilisations paru chez Aquilon en 2006 et Khomeiny en France publié chez Godefroy de Bouillon en 2009.

Yves Bomati est docteur ès lettres et sciences humaines, ancien professeur de lettres classiques. Il a rejoint, en 1996, la Documentation française en tant que responsable éditorial de la collection Retour aux textes. Attaché de presse en 2000, puis responsable du département de la communication de la direction de la Documentation Française à partir de 2002, il a œuvré au processus de fusion entre les Journaux officiels et la Documentation française qui a donné naissance à la Direction de l'information légale et administrative dont il a été nommé directeur de la communication en 2010. Il a été chef de mission des services du Premier ministre, François Fillon. Il a écrit de nombreux ouvrages en liaison avec sa profession de professeur de français, sur des textes classiques de langue française, mais aussi des extraits de la Bible et un dictionnaire de l'administration.

Ce n'est pas la première fois que ces deux auteurs œuvrent ensemble : ils avaient déjà produit un Shah Abbas, empereur de perse 1587-1629, publié en 1998 aux éditions Perrin, et qui avait valu, en 1999, à Yves Bomati le prix Eugène Colas de l'Académie française.
Une biographie est toujours la rencontre d'un contexte avec une personnalité et elle étudie les interactions entre les deux. Dans quelle mesure le contexte a-t-il pesé sur les décisions prises par le responsable politique ? Dans quelle mesure ce responsable politique a-t-il pu agir pour transformer l'état dans lequel il a trouvé le pays lorsqu'il a pris ses fonctions ? C'est à ces questions que se sont appliqués à répondre les deux auteurs.
Comment Mohammad Réza Pahlavi a-t-il géré la situation socio-politique de l'Iran dont il a héritée en 1941? Cet héritage fut très lourd : un pays pratiquement occupé par deux puissances étrangères aux visées impérialistes, l'U.R.S.S. et le Royaume-Uni ; un pays doté d'un pouvoir d'Etat faible et économiquement sous- développé. Comment faire passer ce pays du stade de semi-féodalité à celui de grande puissance du XXe siècle ? Le dernier Shah a-t-il pu relever ce défi titanesque ?

La « Révolution blanche »
Il est hors de doute que le Shah a réussi à faire émerger son pays pour lequel il avait de très hautes ambitions. Justement, n'ont-elles pas été trop ambitieuses par rapport au temps qui lui était imparti ? Il a révolutionné la société iranienne en endossant simultanément les habits d'un Xerxès et d'un Fidel Castro, était-ce réaliste ? Par sa «Révolution blanche», dont les deux axes principaux étaient la réforme agraire et l'égalité des droits politiques entre les hommes et les femmes, il a heurté les structures idéologiques archaïsantes de l'islam. Cette « Révolution blanche» aurait dû porter aux nues le Shah. Il n'en a rien été, des fautes politiques ont été commises et c'est à l'honneur des auteurs de ne pas avoir caché les défauts du Shah. Ces défauts l'ont desservi et son entourage n'a pas été toujours à la hauteur de la situation. Un homme politique doit savoir juger les hommes afin de choisir le collaborateur qui sera le mieux adapté à la situation du moment. Or, le Shah, très imbu de son autorité et de son rôle historique, n'a pas toujours été juste avec ses Premiers ministres. Se pensant comme l'homme providentiel pour l'Iran, Mohammad Réza Pahlavi n'a pas voulu simplement régner mais aussi gouverner, or, de ce fait, il mit sa monarchie en danger car en prenant la responsabilité des choix politiques, il s'exposait au mécontentement, au lieu de rester le recours du régime et le garant de la stabilité, comme la Constitution le prévoyait. Dans la situation complexe et difficile de l'Iran de cette époque, avec une monarchie encore jeune, cela aurait nécessité d'avoir des compétences exceptionnelles que peu de personnalités politiques peuvent se targuer de posséder. Il est à remarquer que toutes les monarchies qui ont survécu ont, sans exception, accepté de ne plus gouverner ; le Shah a fait le contraire et il a creusé la tombe de sa monarchie.
DE NOMBREUSES QUESTIONS, ET DES REPONSES
Au-delà de ces commentaires bien succincts, l'histoire du dernier Shah d'Iran soulève de nombreuses questions : est-ce qu'une monarchie est compatible avec une révolution, même si elle est « blanche » ? Mohammad Réza Pahlavi a-t-il été le souverain de la situation ? Dans quelle mesure a-t-il eu une marge de manœuvre pour élaborer ses choix politiques ? S'il a voulu être à la fois Xerxès et Fidel Castro, le point commun entre ces deux hommes est qu'ils n'avaient rien à voir avec la démocratie et l'Iran a connu un déficit démocratique. Or, peut-on bouleverser les structures sociales et économiques d'un pays sans le faire avec le soutien et la participation de sa population ? L'absence de compétence économique du Shah l'a empêché de comprendre les ressorts de l'hyperinflation née de l'augmentation du prix du pétrole dans les années soixante- dix : l'inflation aurait-elle eu également une responsabilité dans la chute du Shah ? Comment les puissances occidentales purent-elles abandonner le Shah et mettre à sa place un ayatollah animé d'une haine viscérale envers elles ? Comment un prince adulé par les foules iraniennes lors de son périple à l'intérieur de son pays en 1947 a-t-il pu être rejeté trente ans plus tard par les enfants de ceux qui l'avaient acclamé trente ans plus tôt ?

Les lecteurs trouveront les réponses à ces nombreuses questions dans le livre de Houchang Nahavandi et d'Yves Bomati qui ont fait de l'empereur Mohammad Réza Pahlavi un sujet d'histoire. Ce sera au lecteur de constater par les faits qui sont relatés dans ce livre si le Shah en sort plus grand, mort que vivant. Lui qui a voulu revêtir les habits de Xerxès savait pourtant que l'empereur achéménide est mort assassiné et que l'histoire achéménide fait partie, pour l'islam, de la Jâhiliya, l'époque de l'ignorance. Serait-ce une malédiction de l'histoire iranienne que de rejeter ceux qui ont voulu lui donner de la grandeur ?

Louis Chagnon

• Editions Perrin, 622 pages, 27 €